Notes de lecture

Exercices de style de Raymond Queneau

Qui n’a pas entendu parler des Exercices de style de Raymond Queneau, cet ovni littéraire ? J’ai lu ce livre d’une seule traite. C’est drôle, malicieux, poétique. Ça m’a donné envie d’écrire, de noircir des pages et des pages, en m’essayant aux exercices de style, en jouant. C’est l’histoire toute banale d’un jeune homme au long cou, coiffé d’un chapeau ridicule, rencontré deux fois dans la même journée dans le bus de Paris. La même histoire courte, d’une page, est répétée 99 fois sous différentes formes stylistiques : métaphoriquement, sous la forme du rêve, au passé simple, philosophiquement, dans le jargon médical, ou encore sur un ton injurieux.

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Listes, Parenthèses

L’art de ne rien faire : comment restaurer son attention à l’ère des réseaux sociaux ?

Mon été a été particulièrement calme. Probablement sous l’effet de ma lecture de juillet : Comment ne rien faire (How to Do Nothing, Jenny Odell). Il s’agit d’un pamphlet contre le productivisme et pour la restauration de notre attention à l’ère de la suprématie digitale. Dans un moment de ma vie où je remets en question mes notions de performance et de réussite, cet essai a été particulièrement éclairant. L’autrice m’a rappelé les vertus de l’oisiveté, de la contemplation, de la rêverie, de ces moments de latence qui donnent tout son sens à l’action.

Depuis cette lecture, certaines choses ont changé, lentement mais sûrement. J’ai appris à mettre les écrans de côté et à regarder ailleurs, pas par discipline, parce que c’est bon pour moi, mais tout simplement parce que je m’intéressais sincèrement à mon environnement immédiat. Ma concentration s’est restaurée le plus simplement du monde et durant ces longs mois chauds, je me suis réconciliée avec mon horloge interne. J’ai enfin compris ce que les taoïstes voulaient dire par Wu Wei : le non-agir ou l’action naturelle. Paradoxalement, c’est aussi pendant cette période que j’ai lu le plus. Je vous partage donc ici quelques-unes des lectures qui m’ont le plus marquée parmi les livres que j’ai parcourus cet été, avec beaucoup plaisir et sans préméditation.

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Portrait of a Young Woman in White, c. 1798
Notes de lecture

Mon année de repos et de détente d’Ottessa Moshfegh

La dépression n’est pas glamour. Il n’y a ni beauté ni sens dans nos luttes contre ce mal et nous ne sommes pas des héros auréolés pour avoir tenu bon. Personne ne reconnaît nos souffrances et personne ne voit notre bravoure. De l’extérieur, le dépressif est encore vu comme un être végétatif, déficient, parasitaire. Cette épreuve ne nous rend pas meilleur. Après un épisode dans les abysses, il  n’y a pas de grandes épiphanies, notre monde n’est pas radicalement transformé et la vie ne devient pas un long fleuve tranquille une fois que l’on a battu la bête. C’est un apprentissage quotidien où la résilience devient un sport de haut niveau. 

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Aristote sur le bonheur : extraits d'Ethique à Nicomaque
Arts de vivre

Aristote sur le bonheur comme principe actif

Peut-on parler de philosophie grecque sans parler d’Aristote et de Platon ? Ce sont tous deux des esprits brillants, à cette différence près : quand Platon cherchait à transcender la réalité vers le monde des idées, Aristote gardait les pieds plantés fermement sur terre. Esprit studieux, rigoureux et prudent, il met constamment en examen les opinions communes et sait rester humble. C’est une véritable école de la pensée, qui nous arme d’outils de réflexion essentiels, que l’on adhère ou non à sa philosophie. La lecture d’Éthique de Nicomaque est l’occasion de cet apprentissage, dans une langue claire, avec des enchainements logiques bien ficelés. Lire Aristote est une joie car on y découvre, justement, tout l’aspect ludique du raisonnement philosophique.

Dans son Éthique, Aristote nous livre des réflexions sur la vertu, la politique, l’amitié ou encore la justice. Mais sa visée principale, ce qu’il décrit comme le souverain bien, c’est le bonheur. Et dans cet exposé, la conception du philosophe est tout sauf idéaliste : il nous parle d’un bonheur actif, d’un savoir-faire à cultiver, d’une habileté qui s’aiguillonne par la pratique quotidienne.

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